Découvrir la tapisserie - Jean-Luc BURGER
L'art de la tapisserie existe depuis l'Antiquité, et beaucoup de peuples l'ont pratiqué : Grèce antique, Chine impériale, Egypte antique, civilisations précolombiennes. En occident, la tapisserie est utilisée au Moyen-âge, mais connaît un réel essor durant le XIVe siècle. Les tapisseries représentent tantôt des scènes bibliques, tantôt des scènes royales, et par la suite des scènes un peu plus banales.
DECOUVRIR LA TAPISSERIE
La tapisserie recèle mille et un savoir-faire secrets ou ignorés par la plupart d'entre nous, des découvertes extraordinaires, faites de siècle en siècle à travers le monde. Des créateurs de génie, mais aussi des inventions imprévues, l'apparition de motifs célèbres et d'évolutions techniques majeures émaillent des tapisseries qui représentent la mémoire du temps.
De l'exploitation de toutes les fibres possible pour obtenir des fils à celle des pigments pour les teindre, des balbutiemments du tissage à la création de métiers à tisser de plus en plus perfectionnés, ou enfin de l'usage de l'impression à sa cohorte de motifs, c'est une errance au fil de l'univers du tissu.
Tissage ou tapisserie, le principe est le même : la tapisserie est un tissu fabriqué sur un métier à tisser ou bien à la main, dont le tissage représente des motifs ornementaux. Le tissage se compose de deux ensembles de fils entrelacés, ceux à la verticale, les fils de chaîne, et ceux à l'horizontale, les fils de trame[1]. Les fils de chaîne sont mis en place sous tension sur un métier, et le fil de trame est transmis par un mouvement mécanique de va-et-vient sur tout ou partie de l'ouvrage. Souvent la tapisserie est une réalisation textile décorative d'ameublement, se classant dans les arts décoratifs. La tenture murale d'une pièce peut être constituée d'une seule ou d'un ensemble de tapisseries2.
La tapisserie est l'une des plus anciennes formes de tissage textile. En tant que technique, la tapisserie a été utilisée pour créer toutes sortes d'objets, des tuniques et des sacs à main aux nappes et aux dossiers de chaises, ainsi que certaines des plus grandes et des plus belles œuvres d'art textile au monde.
À partir d’une technique de production faisant appel au métier à tisser, l’Art de la tapisserie a traversé les âges. Elle est à différencier de la broderie, qui elle se fait à la pointe de l’aiguille. Pratiqué en tout premier temps durant l’Antiquité par les Égyptiens et les Grecs, cet art décoratif a été développé un peu partout dans le monde : les civilisations chinoise et précolombienne ont également eu recours à cette technique. En occident, la tapisserie est utilisée au Moyen-âge, mais connaît un réel essor durant le XIVe siècle. Outre une fonctionnalité confortable d’isolant phonique, la tapisserie remplit un rôle esthétique inestimable. Les tapisseries représentent tantôt des scènes bibliques, tantôt des scènes royales, et par la suite des scènes un peu plus banales.
LA TAPISSERIE EST UNIVERSELLE
L'art de la tapisserie existe depuis l'Antiquité, et beaucoup de peuples l'ont pratiqué : Grèce antique, Chine impériale, Egypte antique, civilisations précolombiennes3. Les anciens Égyptiens et Incas utilisaient des tapisseries tissées comme linceuls pour enterrer leurs morts. La tapisserie occidentale connaît un essor formidable pendant le XIVe siècle, illustré par la tenture de l’Apocalypse commandée par le duc Louis d’Anjou.
Si le monde occidental semble s'être adonné à cet art durant le haut Moyen Âge, il ne subsiste qu'une tapisserie de la fin du XIe siècle (Drap de saint Géréon, réparti entre le musée des Arts décoratifs de Lyon et les musées de Londres, Berlin et Nuremberg) et quatre du XIIe siècle, trois en Allemagne (tapisseries de la cathédrale d'Alberstadt) et une en Norvège (tapisserie de Baldishol, musée des Arts décoratifs d'Oslo) ; enfin, le XIIIe siècle apparaît comme un siècle démuni. En revanche, des mentions des tapissiers et d'ouvrages de haute lice apparaissent dans les textes dès le début du siècle suivant, à Paris en 1303 et à Arras en 1313, et les œuvres qui nous sont parvenues attestent d'une production importante dès la seconde moitié du XIe siècle et au XVe siècle.
Paris, Arras, Beauvais et Aubusson rivalisent d'ingéniosité pour créer des pièces prestigieuses à la hauteur de celles de Bruxelles et des Flandres. La tapisserie devient une œuvre d'art réservée aux intérieurs les plus riches. Elle valorise des thèmes très variés. La manufacture royale d'Aubusson crée au cours des XVII et XVIIIe siècles des œuvres exceptionnelles illustrant des verdures, scènes historiques, religieuses ou mythologiques.
LA TAPISSERIE DE LA CREATION
La tapisserie de la Création (Tapís de la Creació) est une œuvre de broderie de la fin du XIe siècle ou du début du XIIe, faisant partie du trésor de la cathédrale de Gérone (Catalogne) en Espagne.
La dynastie des Tudors (1485-1603) est à peu près contemporaine de la fin de la dynastie capétienne des Valois (1328-1589) en France. Les Tudors comme les Valois ont eu un goût particulier pour le faste et le luxe. Les Tudors doivent en outre justifier de leur pouvoir, à la fin de la guerre des Deux-Roses, notamment le fondateur de la dynastie, Henry VII (1485-1509), qui semble être le commanditaire de la tenture de l’Histoire de la rédemption de l’Homme offerte par François Fouquet à la cathédrale de Narbonne.
Dans cette première pièce de la Création du Monde, nous assistons au récit de la Genèse et de la chute de l’Homme. La tapisserie se lit depuis la scène du registre supérieur gauche jusqu’à celle du registre supérieur droit en passant par le registre inférieur. Au centre du registre supérieur, la Trinité, assise sur un trône unique, préside la scène, entourée d’anges et flanquée de deux Vertus couronnées, la Justice à droite et peut-être la Miséricorde à gauche. Sur la gauche du registre supérieur, Dieu sépare la Lumière des Ténèbres. Au registre inférieur, il créé le règne végétal. Le groupe situé immédiatement à droite, désignant le Ciel, créé le firmament et les astres : le soleil, la lune, les étoiles. Dieu penché vers la rivière centrale fait naître les poissons et les oiseaux. Au registre inférieur droit, Dieu donne vie aux autres animaux, puis à l’Homme et la Femme, à son image. Au registre supérieur droit, Adam et Eve, tentés par un démon à tête de femme, mangent le fruit de l’arbre de la Connaissance et sont chassés du Paradis par l’archange saint Michel brandissant son glaive.
La tapisserie de la Création compte parmi les chefs-d’œuvre de la Rétrospective de l’art français des origines à 1800 déployés au Petit Palais lors de son inauguration, au sein de l’Exposition universelle de Paris de 1900 . Elle est classée aux monuments historiques en 1901 et restaurée par la Manufacture des Gobelins entre 1910 et 1914.
QUAND UN ART MILLENAIRE DEVIENT CONTEMPORAIN
En 1937, Jean Lurcat découvre la Tenture de l'Apocalypse, immense ensemble tissée pour Louis Ier d'Anjou au XIVe siècle, exposée au château du roi René à Angers. Bouleversé par ce qu'il considère comme l'un des plus hauts chefs-d'œuvre de l'art occidental, il entreprend alors le Chant du Monde, réplique moderne de l'Apocalypse.
Chant du monde est un ensemble de dix panneaux de tapisseries créées par Jean Lurcat. Commencé en 1957, c'est le plus grand ensemble contemporain de tapisseries (80 mètres de long sur 4,40 m de haut).
Des tapisseries exceptionnelles
Longtemps oubliée, rescapée de peu d’une destruction irrémédiable, aujourd’hui encore injustement éclipsée par la fameuse tenture dite de la Dame à la licorne (musée de Cluny, à Paris) et par la célèbre broderie de Bayeux, la tapisserie dite de l’Apocalypse, conservée au château d’Angers, est pourtant la plus ancienne et la plus monumentale tapisserie historiée conservée du Moyen Âge. C’est un monstre sacré de 140 mètres de long à l’origine (il en reste 103) sur 6 mètres de haut (il en reste 4,5), 90 scènes, 200 personnages, un univers foisonnant d’anges et de démons, de calamités et de villes détruites, de monstres et de chevaliers dont le sens souvent nous échappe.