De gribouillage aux traits plus réguliers je suis parvenue progressivement à exprimer une part de moi. Les huiles de mes débuts ont peu à peu perdu leurs couleurs (années 80) pour un monde en noir et blanc à l’atmosphère de bandes dessinées. Rêches et sanguinaires parfois, les traits ont fini par s’adoucir (années 90) mais n’ont jamais cessé d’exprimer ma passion, ma colère et ma mélancolie, celle de tous ceux arrachés d’une terre de naissance et de ceux qu’ils ont aimés et perdus.
Terre montagneuse berçant le soufisme, jamais aucune prose n’a pu égaler dans mon esprit celle persane dans les quatre langues que je parle. Les mots me sont donc revenus (années 2000), mêlés d’encre, dans la langue du chants triste d’un peuple qui danse et sème des couleurs du haut de sa douleur. Un peuple qui s’accroche à la vie et qui toujours debout, se bat encore. Les deux séries « De sang et de safran » et « Diagonale » où prose et couleurs se mêlent y font référence. Une danseuse, « Delarâme », souvenir de douceur, disparaît dans un rayon lumineux et un envol de papillons bleus…Quant à mes nues, sans tête, détournant le visage, elles expriment toutes un sentiment de détresse et de solitude.